Des médias censurent les dessins de Charlie Hebdo sur l'islam

Suite à l'attentat perpétué ce mercredi dans les locaux de Charlie Hebdo, de nombreux médias, et notamment la Libre Belgique, ont apporté leur soutien au journal en diffusant des caricatures de l'hebdomadaire. En France bien sûr, en Belgique aussi, mais dans toute l'Europe, et le monde. Une forme de soutien et de respect, mais également une revendication, une démonstration de l'indépendance de la presse et la liberté de ton, en tous temps et à jamais.

Tous les médias, toutefois, ne diffusent pas les caricatures de Charlie. Au contraire, certains quotidiens américains et britanniques floutent et coupent aujourd'hui les dessins qui se moquent de l'islam, rapporte Slate.

Ainsi, The Telegraph publiait une photo d'une jeune femme lisant l'un des numéros controversés de Charlie Hebdo, mais en ayant pris le soin de flouter le prophète Mahomet. La photo a, depuis, été retirée du site. La photo de Charb, rédacteur en chef du journal satirique, tenant la une de son journal a, elle, été découpée: du quotidien, il ne reste que le titre. Le dessin, Intouchables 2, avec un rabbin poussant un imam en chaise roulante, a été supprimée. Cette caricature avait également été censurée par le New York Daily News, qui avait flouté l'imam, mais pas le rabbin.


Aujourd'hui, le quotidien américain illustre son article avec une photo de Charb devant les locaux incendiés de Charlie Hebdo, le journal en main... flouté.


L'agence Associated Press elle, ne distribue aucune des images qui "montrent des caricatures du prophète Mahomet. Depuis quelques années, notre politique est de ne pas diffuser d'images délibérément provocatrices."

De nombreux médias américains, et notamment les grandes chaines de télévision, ont pris la décision de ne pas diffuser de contenu pouvant heurter la sensibilité de certaines personnes.

Le New York Times explique à Buzzfeed: "Suivant les règles du journal, nous ne publions habituellement pas d'images intentionnellement créées pour heurter les sensibilités religieuses. Après avoir réfléchi soigneusement à la question, les éditeurs du Times ont décidé que le fait de décrire les caricatures en question donnerait aux lecteurs assez d'informations pour comprendre les événements d'aujourd'hui."

Ne pas diffuser, c'est capituler?

Ne pas diffuser les dessins satiriques de Charlie Hebdo, pourquoi? Par mesure de sécurité, mais aussi un choix éditorial. Pour certains éditeurs, les caricatures sont sont "inutilement choquantes", raconte Slate, voire "stupides", affirmait mercredi un chroniqueur du Financial Times. La chronique, sujette à de vive critiques en ligne, a été édulcorée et le journaliste a depuis été désavoué par les responsables de son propre média.


Certains médias font donc le choix, non pas d'une capitulation lâche, mais d'une approche plus pragmatique: provoquer, à quoi bon? La Maison Blanche épousait déjà ce choix éditorial et politique, lorsque Charlie Hebdo brûlait en 2012, victime d'un incendie criminel suite aux caricatures de Mahomet.

Barack Obama avait alors déclaré à l'époque: "Nous avons parlé à plusieurs reprises de l'importance de protéger la liberté d'expression, qui est inscrite dans notre Constitution. Autrement dit, nous ne nous interrogeons pas sur le droit de telles choses à être publiées, simplement sur le jugement qui a présidé à la décision de les publier."

Le choix de flouter ou non les caricatures de Charlie Hebdo relève aussi d'us et coutumes propres à chaque pays. Charlie Hebdo, c'est la satire à la française, une liberté de ton acide et totale, un pan de l'identité française qui n'est pas forcément de coutume dans les sociétés anglo-saxonnes.